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L’art n’est-il pas une interrogation sur la beauté ? Plutôt que la beauté en soi. A moins que la beauté de l’art ne soit, initialement, cette question elle-même ?

La beauté n’est pas la « plastique » ou si l’on préfère elle n’est pas la « forme. » Elle est comme la venue à la lumière, non de quelque objet, ou même de telle ou telle forme précisément, mais peut-être davantage encore la lumière elle-même. Que ce terme désigne, non quoi que ce soit de « lumineux », quelque éclairage, disons « physique », mais plutôt cela même qui est dit et qui tout autant, s’agissant de la peinture, suscite en nous, au fond du regard du spectateur, une émotion, voire une interrogation.

Comment ainsi ne pas être saisis par les peintures de Marlyne Blaquart ? Et comment ce saisissement ne serait-il pas lui-même un questionnement ?

Il est difficile de définir tous les éléments qui sont à l’origine de ce qu’il faut cependant reconnaître ici comme énigme.

Les paysages s’y trouvent, d’une nature, sinon intacte de la société des hommes, mais à tout le moins délivrée de toute trace matérielle de celle-ci (chemin, maison, clôture…) Ils ont en sus cette particularité étrange de n’occuper parfois qu’une partie de l’espace qui s’offre au regard, le ciel ayant comme disparu, les arbres dessinant alors une masse surplombée seulement par le fond de la toile ou du papier. D’autres, en revanche, occupent entièrement le tondo (comme on désigne ces images inscrites dans un cercle – « rotondo »).

La nature ici, par deux procédés qui ne sont cependant pas systématiques, prend toute sa place. De façon opposée semble-t-il. Mais de telle sorte qu’elle apparaisse comme dans sa vérité, dans sa plénitude enfin.

Et cela est vrai, chez Marlyne Blaquart, autant pour les paysages que pour les natures mortes. Lorsqu’elles peint deux citrons, la pomme, la mangue ou le raisin, ils sont là devant nous, plus présents que des objets, même s’il s’agit évidemment d’objets « naturels. » Parce que sans doute, ce que l’on voit en eux c’est cette vie qui les habite, qu’ils représentent à tout le moins, le désir qu’ils provoquent peut-être, le plaisir qu’ils donnent à notre regard et avant tout la sensation tout entière que nous en avons – comme celle à laquelle nous invitaient tout à l’heure les petit paysages , celui de l’étang ou celui de la rivière.

La découverte de la peinture de Marlyne Blaquart est elle-même comme une sorte de question : elle ne peut sans doute se faire que sous la forme d’une interrogation. Qui n’est pas seulement un étonnement, mais presque un problème, une étrangeté en tout cas. Nous voici interrogatifs, demandant non pas à la peinture mais plutôt à nous-même d’éclaircir ce qui est encore mystérieux, incompris alors que le regard, lui, est saisi. Et cela d’autant plus que se mêlent, s’entrelacent deux directions, celle de la peinture, du sujet, de leurs beautés réciproques et familières, et celle aussi de leur « présentation », de leur advenue qui, comme à l’inverse, est singulière et même insolite.

C’est pourquoi un détour vers la peinture de Marlyne Blaquart est un pas de côté qu’il ne faut pas hésiter à faire. Ce pas, cet écart c’est sans doute celui là-même qui fait qu’il y a un « art. »

Marlyne Blaquart nous le dit avec modestie, voire avec prudence, mais aussi avec une assurance certaine : l’art est une question et ne doit cesser de questionner, de se questionner lui-même. De faire quelque chose comme nous dérouter. A chaque instant.

On peut ainsi aller sur le site de Marlyne Blaquart :

https://marlyne-blaquart.com/index.php/presentation

On peut aussi lire le livre intitulé « La vie simple » paru récemment aux éditions Conférence dans la collection « En regard. »

Outre un travail éditorial de présentation des travaux de Marlyne Blaquart particulièrement soigné on y lira deux textes particulièrement éclairants l’un comme l’autre. Le premier est signé de Jérôme Thélot sous le tire « Un art droit. » Le second, sous la plume d’Alain Madeleine-Perdrillat est intitulé « Expériences et réserve. »

https://revue-conference.com/